vendredi, août 04, 2006

Lucidité éphémère

Il pleut. C’est magnifique.
Les dernières gouttes d’un orage mourant s’écrasent contre la fenêtre. Les nuages épuisés font maintenant place à un crépuscule naissant.

Mon corps, atrophié par une trop longue absence, se languit dans un fauteuil vieilli par un bonheur passé.
Dans mes bras, ma robe de mariée grisée par la poussière et l’oubli vient de me murmurer son dernier soupir. J’étais seule ; je suis perdue.

L’écran d’ordinateur procure la seule et unique lumière de la chambre. Je ne sais pourquoi, je ne sais comment : au fond, cela n’a pas vraiment d’importance.
Mes doigts se jouent des touches du clavier dans un cliquetis ingénieusement étouffé. Mes songes s’éternisent sur support virtuel à la vue de tous. Et pourtant, ironie de mon agonie, la seule personne à qui je les destine ne peut plus les deviner.

Une folie contenue s’épanche progressivement au creux de mon âme : le poison s’insinue douloureusement. Je le sens peu à peu prendre le contrôle du flot de mes pensées si rationnel jadis.

Jadis. Jadis, la pluie était laide, la grisaille était maudite. Jadis, le soleil ne me brûlait pas les yeux, les rires ne me brisaient pas encore le cœur, le bonheur était de ce monde.


Jadis, nous étions.